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07/08/2012

Impossibilité de raccordement au réseau d'eau et d'assainissement ? (Jurisprudence)

permis de construire,eau,assainissement,raccordement,réseau publicLa Cour administrative d'appel de Nancy a eu l'occasion de préciser dans quel cas le raccordement au réseau public de distribution d'eau et d'assinissement n'est pas possible.


Dans cet arrêt, la Cour statuait sur un refus de permis de construire pour le changement de destination d'une construction isolée, qui était motivé par l'insuffisance de desserte en eau et en assainissement dans une petite commune alsacienne.

Les règles sont ici données par l'article L. 111-4 du Code de l'urbanisme (anciennement article 421-5) qui dispose que : « lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés».

 

Le Conseil d'Etat a déjà eu l'occasion de préciser que les deux conditions de cet article sont cumulatives : 1° - nécessité de la desserte et 2° - impossibilité pour le maire d'indiquer dans quels délais et par qui ces travaux doivent être exécutés (CE, 4 mars 2009, Mme Matari, n°303867).

Or, pour le Conseil d'Etat, la première condition de la nécessité de la desserte en eau et/ou en assainissement n'est pas remplie en présence d’un dispositif de puisage et/ou d’assainissement individuel efficace (Conseil d'Etat, 30 octobre 1996, Creignou, n°126150). Il n'y a pas non plus lieu d'appliquer cet article lorsque la desserte peut être réalisée par des branchements privés aux frais du pétitionnaire  (CE, 12 janvier 1994, Ministre de l'équipement, n°86912).

 

En l'espèce, s'agissant d'une commune non dotée d'un document d'urbanisme, la nécessité d'un raccordement au réseau public de distribution d'eau et d'assainissement ne faisait guère de doute, l'article R. 111-8 du Code de l'urbanisme rendant obligatoire cette desserte.

Quant à la deuxième condition, elle ne serait remplie qu'à « la condition pour l'autorité administrative "d’avoir accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation » (CE, 4 mars 2009, Mme Matari, req. 303867, précité), d'où la nécessité pour le Maire de bien expliciter les raisons qui rendent impossible ou très difficile l'extension du réseau existant à la construction projetée .

Première observation sur l'arrêt étudié, la Cour administrative d'appel de Nancy ne se limite pas à un simple contrôle de la motivation de l'arrêté de refus, dans la plupart des cas laconique et paraphrasant le texte de loi, en indiquant seulement que le Maire n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique les équipements nécessaires pourront être réalisés.

Dans son analyse, la Cour relève trois éléments décisifs pour motiver légalement un refus de permis de construire pour insuffisance de desserte en eau et assainissement :

§  le réseau de distribution est éloigné et le réseau d'assainissement inexistant,

§  la construction ne prévoit pas de dispositif d'assainissement autonome,

§  une desserte est possible, côté ouest, mais pour un coût hors de proportion avec le budget de la commune, ou bien côté est, mais en comptant avec de fortes baisses de pression pour le réseau.

Dans cet arrêt, la Cour apprécie la possibilité d'effectuer les travaux nécessaires au raccordement d'une construction de manière concrète, en fonction tant du coût pour la collectivité du raccordement de la construction projetée, que de ses conséquences sur la qualité du service pour les autres usagers, et la complexité technique de sa réalisation :

"Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier, et plus particulièrement des plans produits à l'appui de la demande de permis de construire, que le réseau d'eau s'arrête de part et d'autre du terrain de M. A, à 120 mètres vers le lotissement à l'ouest et à plus de 80 mètres vers l'est, et que le réseau d'assainissement est inexistant, la demande de permis de construire ne contenant aucun descriptif d'assainissement autonome ; que si M. A se prévaut de permis de construire délivrés rue des Champs, ceux-ci, dont certains n'ont pas été accordés dans la même section cadastrale ou qui bénéficient de borne " eau " au droit de leur parcelle, ne suffisent pas à établir qu'à la date du permis de construire en litige, la construction projetée ne rendait pas nécessaire la réalisation de travaux, tant sur le côté est que sur le côté ouest, sur le réseau public de distribution de l'eau potable de la commune de Heiligenberg ;

Considérant, d'autre part, que, dans le cadre de l'instruction du permis de construire, le maire de la commune a émis un avis selon lequel le raccordement au réseau d'eau potable du bâtiment n'est pas possible en l'état existant du réseau dès lors, d'une part, que si une canalisation existe à 80 m du côté est, cette conduite est connectée au réseau principal sur la rue de la Batteuse située en contrebas d'un dénivelé de 40 m rendant le débit d'eau inexistant, d'autre part, que si la canalisation existante au niveau du lotissement situé rue Dannheck, coté ouest, peut desservir la construction litigieuse, les travaux sont à la charge de la commune et correspondent à 140 mètres de canalisation supplémentaire, ce qui ne correspond pas à un branchement particulier ; qu'au surplus, le syndicat des eaux et de l'assainissement du Bas-Rhin, consulté par la collectivité, a indiqué le 7 novembre 2011 que la desserte par le côté est, à 80m est possible, mais qu'il y aura de fortes baisses de pression et que la desserte par le coté euest est elle aussi possible, pour un coût de 14 000 € HT, hors de proportion avec le budget de la commune ; qu'à la date de l'arrêté attaqué, la commune, ainsi qu'elle l'a indiqué dans la décision litigieuse, n'était pas à même d'indiquer un délai pour la réalisation desdits travaux ; que c'est ainsi à tort que le Tribunal administratif s'est fondé sur le motif tiré de ce que le préfet n'établissait pas la réalité de ses allégations pour annuler le refus de permis de construire opposé à M. A ; que, dès lors, le maire, au nom de l'Etat, était tenu, en application des dispositions précitées, d'opposer un refus à la demande présentée par M. A ; que dès lors, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse serait entachée de détournement de pouvoir est inopérant ;"

(CAA Nancy, 2 août 2012, Ministre de l'écologie, n°11NC01808)

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