07/01/2013
Fermeture administrative d’une boite de nuit : les garanties procédurales (Jurisprudence)
La Cour administrative d'appel de Nantes précise les garanties procédurales qui encadrent la procédure de fermeture administrative, en annulant l’arrêté préfectoral prononçant la fermeture pour six mois de la boite de nuit « Le Calypso » à Nantes.
L’article L. 3332-15 du Code de la santé publique prévoit notamment que la fermeture des débits de boisson et des restaurants peut être ordonnée par le préfet de département pour une durée inférieure ou égale à six mois, dans le cas d’infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements (lutte contre le tabagisme, travail dissimulé, service d’alcool à une personne jusqu’à l’ivresse, etc.).
Dans ce cas, il est précisé que la fermeture administrative provisoire doit obligatoirement être précédée d’un avertissement, qui peut se substituer à la décision de fermeture lorsque les faits susceptibles de justifier cette fermeture résultent d'une défaillance exceptionnelle de l'exploitant ou à laquelle il lui est aisé de remédier.
En l’espèce, le Calypso avait reçu en octobre 2007 un courrier de la Préfecture l’informant qu’elle était susceptible de faire l’objet, soit d’un simple avertissement, soit d’une mesure de fermeture administrative, pour l’infraction de service d’alcool à une personne jusqu’à l’ivresse, dans la nuit du 12 au 13 avril 2007, faits relevant du premier cas de l’article L. 3332-15.
Finalement, le 7 novembre 2007, l’établissement n’a reçu qu’un simple avertissement de la Préfecture.
Puis, le 2 mai 2011, alors que beaucoup de temps (et de bière) s’était écoulé, le Préfet de Loire-Atlantique a prononcé la fermeture administrative de la discothèque pour une durée de six mois.
Dans cette affaire, la Cour administrative d'appel considère qu’à la suite du précédent courrier du 15 octobre 2007, qui annonçait soit un avertissement, soit une fermeture, la sanction de l’avertissement qui a été choisie le 7 novembre 2007 s'est substituée à la sanction de fermeture envisagée initialement.
Dès lors, pour la Cour, le courrier du 7 novembre 2007 infligeant un avertissement, ne saurait constituer l’avertissement spécifique, exigé par ces dispositions, selon lequel la société exploitante de la boite de nuit pourrait ultérieurement faire l’objet d’une fermeture administrative.
Implicitement, tel n’est pas non plus le cas, semble-t-il, du courrier du 15 octobre 2007 qui s’est déjà concrétisé dans l’avertissement infligé le 7 novembre 2007.
La Cour refuse également de tenir compte d’un précédent arrêté de fermeture pour l’infraction de service d’alcool à une personne manifestement ivre, en 2008, le préfet s’étant alors fondé sur le deuxième cas prévu par l’article L. 3332-15, relatif aux atteintes à l’ordre public, et non, comme en l’espèce, au premier cas relatif aux infractions aux lois et règlements relatifs aux débits de boisson et aux restaurants.
En conséquence, pour la Cour, l’arrêté doit être annulé pour défaut d'avertissement préalable, dans la mesure où le non-accomplissement de cette formalité substantielle, prive le requérant d’une garantie procédurale.
"5. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que lorsque le préfet envisage d'ordonner la fermeture administrative d'un débit de boissons à la suite d'infractions aux lois et règlements relatifs à ces établissements, il doit préalablement en avertir l'établissement ; qu'il est constant que pour prendre l'arrêté contesté, l'autorité administrative s'est fondée à la fois sur la commission d'une infraction aux lois et règlements relatifs aux débits de boissons et sur une atteinte à l'ordre public ; qu'en tant qu'il sanctionne des faits susceptibles de recevoir une qualification pénale, l'arrêté du 2 mai 2011 devait être précédé d'un avertissement ; qu'il ressort des pièces du dossier que par un courrier du 15 octobre 2007, l'autorité administrative a informé la société BMC que suite à l'infraction de service d'alcool à une personne jusqu'à l'ivresse commise par cet établissement dans la nuit du 12 au 13 avril 2007, une sanction administrative était envisagée à son encontre sous la forme d'un avertissement ou d'une fermeture administrative ; que par un second courrier du 7 novembre 2007, le préfet de la Loire-Atlantique a informé la société BMC qu'un avertissement lui était infligé ; que cet avertissement s'étant alors substitué à la sanction de fermeture administrative qui avait été envisagée par le préfet le 15 octobre 2007, il ne pouvait valoir avertissement préalable permettant au préfet de la Loire-Atlantique de prendre la sanction du 2 mai 2011 de fermeture administrative pour une durée de six mois de la discothèque " Le Calysto ", sur le fondement du 1° de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique ; que le préfet ne peut utilement se prévaloir du fait qu'en 2008, le même exploitant a déjà fait l'objet d'une fermeture administrative d'un mois pour service d'alcool à une personne manifestement ivre, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des termes mêmes de l'arrêté du 17 juin 2008, que le préfet a entendu se fonder sur le 2° de l'article L. 3332-15 du code de la santé publique et non sur le 1° ; que, par suite, l'arrêté contesté a été pris au terme d'une procédure irrégulière ;"
(CAA Nantes, 21 décembre 2012, Société BMC, req. n°11NT02967)
23:13 Publié dans Fermeture administrative | Tags : fermeture administrative, débit de boisson, boite de nuit, discothèque, restaurant, préfet, infraction, ordre public | Commentaires (0) | |
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