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05/10/2012

Retrait de permis de construire illégal : quels droits pour le bénéficiaire ? (Jurisprudence)

retrait,permis de construire,illégal,intempéries,préjudice,perte de loyersA quelques jours d'intervalle, le Conseil d'Etat a statué sur les droits à indemnisation de deux bénéficiaires de permis de construire retirés illégalement.


La première affaire concernait un retrait de permis, intervenu au delà du délai légal de retrait, et donc par conséquent illégal, que le permis soit lui-même illégal ou non.
 
A l'époque des faits, un permis de construire ne pouvait être retiré que s'il était illégal et ce, dans le délai de recours contentieux, soit dans un délai de 2 mois suivant l'affichage régulier du permis de construire.

On notera qu'une ordonnance du 8 décembre 2005 est venu modifier le délai de retrait, désormais prévu à l'article L. 425-4 du Code de l'urbanisme, selon lequel un permis de construire ne peut être retiré que s'il est illégal, dans le délai de 3 mois suivant sa délivrance.
 
Le retrait intervenu le 11 juin 2001, pour un permis délivré le 7 août 2000, soit près d'un an plus tard, avait entraîné, à la suite d'intempéries, des conséquences désastreuses sur la construction dont les travaux ont été interrompus alors que la toiture avait déjà été entièrement déposée, laissant le chantier à l'air libre, et ce, avant que - hélas bien plus tard - le Tribunal, puis la Cour administrative d'appel reconnaissent l'illégalité de la décision de retrait prise hors délais.
 
A cette occasion, la Haute Juridiction rappelle que, si la responsabilité de la commune peut être engagée compte tenu de l'illégalité du retrait de permis directement à l'origine du préjudice subi par le requérant, cette responsabilité est susceptible d'être atténuée par la faute de la victime qui, en l'occurence, a fait preuve de légereté, en partie à l'origine de son préjudice ou bien l'ayant empêché de l'éviter ou de l'atténuer.
 
Dans cet arrêt, le Conseil d'Etat approuve la Cour administrative d'appel qui a réduit le montant de l'indemnisation accordée en première instance, au motif que le requérant avait négligé de procéder au bâchage de l'immeuble, et n'avait par ailleurs effectué aucunes démarches pour tenter d'obtenir de nouvelles subventions par rapport à celles qu'il avait perdues suite à l'interruption de ses travaux plusieurs années plus tôt.
 
"3. Considérant qu'après avoir relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que M. B n'avait tenté, après le retrait de son permis, aucune démarche de nature à assurer la protection de son immeuble contre les effets des intempéries, la cour n'a pas inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en estimant que cette carence était constitutive d'une faute de nature à atténuer la responsabilité de la commune de Piolenc ;

4. Considérant que la cour administrative d'appel a pu, sans contradiction de motifs, retenir l'existence d'une telle carence de la part de M. B tout en relevant que, comme l'indiquait le requérant, l'expert ultérieurement désigné avait indiqué qu'un bâchage aurait été inefficace sur le long terme et que l'état de l'immeuble rendait difficile la réalisation d'une toiture provisoire ;

5. Considérant que, pour écarter le préjudice résultant selon M. B de la perte de subventions de l'Agence nationale pour l'amélioration de l'habitat qui lui avaient été initialement accordées, puis retirées en raison de l'interruption de son chantier, la cour administrative d'appel s'est fondée sur l'absence de démarche de M. B en vue de l'obtention de nouvelles subventions et, par suite, sur le caractère éventuel de ce chef de préjudice ; que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en relevant, au soutien de son analyse, que M. B aurait pu le cas échéant se prévaloir des dispositions de l'article R. 321-18 du code de la construction et de l'habitation qui prévoient que des subventions peuvent, lorsque le dossier n'a pu être déposé avant le début des travaux, être néanmoins accordées à titre exceptionnel par cette agence " notamment en cas de travaux réalisés d'office par la commune ou par l'Etat (...) et en cas d'application de l'article L. 125-1 du code des assurances relatif aux dommages causés par des catastrophes naturelles ou de l'article L. 122-7 du même code relatif aux dommages causés par les effets du vent dus aux tempêtes, ouragans et cyclones ", compte tenu du caractère non limitatif de cette énumération ; "

(CE, 24 septembre 2012, req. n°342236)
 
Lire l'arrêt
 


La deuxième affaire, donnait une nouvelle fois au Conseil d'Etat l'occasion de préciser que le préjudice résultant d'une décision de retrait de permis de construire illégale ne peut être indemnisé que dans la limite où il n'est pas en partie dû à la faute ou au comportement du requérant.

 
Dans cette affaire, était demandée l'indemnisation du préjudice de perte de loyers résultant de la décision de retrait de permis de construire annulée précédemment par le juge.
 
En effet, le retrait du permis de construire avait privé le requérant des loyers qu'il auraît dû percevoir durant la période à laquelle il a été contraint de renoncer à la réalisation de son projet immobilier, entre le moment où le permis lui a été retiré et l'annulation de cette décision de retrait illégale. 
 
Cependant, la période d'indemnisation revendiquée par le requérant devait nécessairement être limitée, dans la mesure où ce dernier a fait le choix de différer ses travaux et la mise en location des logements réalisés, les pertes de loyers correspondantes ne pouvant alors être imputées à la commune. 
 
"Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. Bernard A a notamment demandé réparation de la perte de loyers qu'il aurait dû percevoir, s'il n'avait été obligé de renoncer temporairement à la réalisation de son projet immobilier du fait de la mesure illégale dont il a été l'objet, entre la date du retrait du permis de construire et celle à laquelle lui a été notifiée l'annulation de ce retrait ; que la cour a toutefois reporté la période d'indemnisation prise en compte à ce titre, eu égard à la circonstance que l'intéressé avait différé les travaux et la mise en location des logements réalisés d'environ deux ans, mais en fixant l'indemnité dans la limite des conclusions présentées par M. A quant aux montants réclamés et à la durée de privation de loyers ; que dès lors, contrairement à ce que soutient la commune, la cour administrative d'appel de Nantes n'a pas statué au-delà des conclusions dont elle était saisie ; que, par voie de conséquence, doit également être écarté le moyen tiré de ce qu'elle aurait méconnu le principe selon lequel une commune ne peut être condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas ;"

(CE, 28 septembre 2012, Cne de Challans, req. n°341925)

 
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